Hygiène et toilette du XVIIIe au XIXe siècle

hygiène

L’évolution des pratiques d’hygiène et de toilette aux XVIIIe et XIXe siècles offre un spectacle contrasté. La plus grande partie du XVIIIe est encore largement sous l’emprise des conceptions médicales de la période antérieure… Et des méthodes de propreté qu’elles induisent.

II faut attendre le dernier tiers du siècle pour que se manifeste un réel changement. Celui-ci se poursuivra et s’amplifiera au XXe, particulièrement avec la démocratisation d’usages de propreté jusque-là réservés à une élite. Une constante traverse cependant l’ensemble de cette évolution, c’est l’importance primordiale accordée, sous des formes diverses, aux produits aromatiques et, tout spécialement, aux parfums.

L’héritage du Grand Roi

La toilette matinale du Roi-Soleil, rituel théâtral auquel assistent les courtisans les plus proches du souverain, est un indicateur remarquable… Non pas de l’état hygiénique de la population française, mais du traitement considéré à la fois comme le plus raffiné et le plus adapté pour préserver la santé la plus précieuse du royaume. Son médecin, son chirurgien et sa nourrice commencent par lui frotter le corps avec des linges blancs et secs, puis lui passent une chemise propre. Un valet verse ensuite sur ses mains un flacon d’esprit-de-vin. Le roi est alors rasé, habillé, peigné et s’assied sur sa chaise percée avant de passer à table.

L’évitement de l’eau et ses raisons

Dans ce ballet minutieusement réglé, l’évitement de l’eau est flagrant. Et marque le triomphe de théories largement développées et mises en œuvre au siècle précédent. C’est, en effet, à l’époque de la Renaissance que s’est concrétisée la théorie médicale selon laquelle l’eau et surtout l’eau chaude représenterait, en temps d’épidémie, un grave danger en ouvrant les pores de la peau à l’air pestilent. Les bains de bouches sont rares et la brosse à dent est encore loin d’être inventée et utilisée.

Étuves et bains, fuyez-les ou vous en mourrez, affirme Guillaume Bunel, Professeur en Médecine à l’Université de Toulouse, en 1513. Et Ambroise Paré de renchérir :

« Les médecins doivent défendre les étuves et les bains en raison qu’après qu’on en est sorti, la chair et l’habitude du corps en est ramollie et les pores ouverts, et, partout, la vapeur pestiférée peut entrer promptement dedans le corps et faire mourir subitement« .

Ambroise Paré

L’eau est un vecteur de maladies

Sous la double pression du corps médical et de l’église qui les accuse d’être des lieux de stupre et de débauche… François 1er va prononcer la fermeture de nombreux établissements de bains. Ces étuves auront presque toutes disparu à la fin du XVIe siècle. On voit donc le dépérissement d’une pratique d’hygiène héritée de l’empire romain et encore très prisée au Moyen-Age. Au siècle, la cause semble définitivement entendue. Chauffer le corps serait ouvrir les portes au venin de l’air et le boire à pleines coupes écrit le docteur David Jouysse en 1668. Louis XIV dispose pourtant, à Versailles, d’un somptueux appartement de bains doté d’une grande cuve octogonale, taillée dans un seul morceau de marbre, et de deux baignoires longues. Mais elles resteront essentiellement un élément de décor.

La médecine et les bains

Le Journal de Santé tenu quotidiennement par les médecins du roi, révèle qu’il n’y prendra que deux bains… Dont l’un sera interrompu par mesure de précaution. En fait, le bain n’est plus une habitude de propreté ni d’hygiène, mais une démarche médicale exceptionnelle… À laquelle on recourt avec beaucoup de réticence, lorsque le corps ayant été abondamment saigné a besoin d’être humecté. Toutes ces conceptions vont largement obérer les pratiques hygiéniques du XVIIIe siècle. Mais il ne faut pas en conclure qu’elles sont inexistantes, car, parallèlement à l’évitement de l’eau, ont été développées d’autres stratégies de la propreté.